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Marceline Loridan-Ivens " Et tu n'es pas revenu "
Marceline Loridan-Ivens " Et tu n'es pas revenu "
Et tu n'es pas revenu" - Marceline Loridan-Ivens avec Judith Perrignon - Le Livre de poche (Grasset) - 83 pages de récit plus un dossier "Retour sur la destruction des juifs en Europe" de Annette Wieviorka. prix 5,90 euros. Grand prix des lectrices Elle.
Merci Mesdames
Marceline Loridan-Ivens, née Marceline Rosenberg, est une cinéaste française née le 19 mars 1928 à Épinal décédée à Paris le 18 septembre 2018.
Judith Perrignon, née en 1967, est une journaliste, écrivaine et essayiste française.
Au verso du livre
« J’ai vécu puisque tu voulais que je vive. Mais vécu comme je l’ai appris là-bas, en prenant les jours les uns après les autres. Il y en eut de beaux tout de même. T’écrire m’a fait du bien. En te parlant, je ne me console pas. Je détends juste ce qui m’enserre le cœur. Je voudrais fuir l’histoire du monde, du siècle, revenir à la mienne, celle de Shloïme et sa chère petite fille. »
Le 29 février 1944, Marceline Loridan-Ivens a quinze ans lorsqu'elle est arrêtée avec son père lors d'une rafle. Déportée à Birkenau, elle subit l'horreur des camps et parvient à survivre. Son père, lui, ne reiviendra jamais d'Auschwitz. Soixante-dis ans plus tard, elle lui adresse une lettre, rédigée avec la romancière et journaliste Judith Perrignon, où elle raconte sa captivité, son retour, sa vie d'après.
Ce livre est un témoignage inestimable et il n'est pas le seul mais plus il y en a et mieux c'est pour nous tous pour nos enfants, pour nos petits enfants... qu'ils continuent, qu'ils transmettent ce qu'on leur a appris. Il faut partager ce témoignage, je me dois d'en partager la lecture bouleversante car il y a des époques de notre Histoire qu'il ne faut surtout pas passer outre.
Marcelline Loridan-Ivens née Rozenberg écrit une lettre d'amour pur à son père 70 ans après leur douloureuse séparation devant le camp d'Auschwitz, nous sommes en 1944. Elle n'avait que 15 ans alors lorsque son père lui dit en guise d'adieu " tu reviendras parce que tu es jeune, moi je ne reviendrai pas ". Marcelline se répète ces mots chaque instant de sa terrible vie de déportée, chaque instant où elle sait que la mort va la prendre cette phrase va l'aider à ne pas sombrer, avec l'effet du hasard peut-être mais avec l'effet psychologique que lui procurent les derniers mots de son père, mots essentiels à sa survie.
Pendant qu'il lui reste un soupçon de vie à Birkenau elle, elle ne pense qu'à lui, qu'à ce père qui n'est pas loin d'elle mais qu'elle ne peut pas atteindre et qu'elle n'atteindra plus jamais.
Après les horreurs vécues, elle se retrouve chez elle avec ce sentiment terrible de culpabilité que ressentent les victimes d'injustice et de cruautés morbides, pourquoi n'est-elle pas morte elle plutôt que son père et plutôt que tous les autres ?
Page 53 ... Mon retour est synonyme de ton absence. A tel point, que j'ai voulu l'effacer, disparaître moi aussi? J'ai sauté dans la Seine deux ans plus tard, l'année où Henri se mariait. C'était un peu après le quai Saint-Michel, j'avais enjambé le parapet, j'allais m'élancer quand un homme m'a retenue. Puis j'ai eu la tuberculose, on m'a placée dans un sénatorium chic en Suisse, à Montana. Maman venait me voir parfois. Je ne supportais pas son impatience, cette façon qu'elle avait de me réclamer d'aller bien et d'oublier. J'étais si lourde. J'ai tenté de mourir une deuxième fois. Au camp pourtant, j'ai tout fait pour être des vivantes. Ne jamais me laisser aller à l'idée que la mort c'était la paix. Ne jamais devenir celle que j'ai vue se jeter dans les fils électriques...
Pourtant il va falloir faire sa vie, elle la rescapée des camps de la mort, elle doit vivre et transmettre ses souvenirs aussi horribles soient-ils, il faut qu'elle vive qu'elle écrive à son père, et pour transmettre ce devoir de mémoire dont nous parlons si souvent de nos jours mais pas encore assez. Il s'agit d'un témoignage essentiel à la survie de notre Humanité pour que jamais, jamais ne se reproduise de telles atrocités et pour qu'on retrouve et pour qu'on retrouve cette espérance d'un être humain meilleur. Tous les rescapés de génocides peuvent écrire, je les lirai et je transmettrai le « plus jamais ça « même s'il n'est pas du tout respecté dans le monde d'aujourd'hui, oui je le transmettrai quand même parce que je ne veux pas être hantée par l'Homme devenu complètement inhumain.
Je vais m'exprimer en psychologue : Ecrire ce qui est ancré dans nos entrailles et qui (en ce cas précis) nous pourrit la vie, n'est pas la même chose que le dire oralement ou le crier au monde entier. On dit que les écrits restent, il faut y croire car cela est utile aux autres autant qu'à soi pour expulser dans la mesure du possible le mal et tenter de dominer ses propres souffrances.
L'écrit est le souffle qui permet de rester en vie. Ecrivez vos souffrances.
Continuez à témoigner, nous continuerons à partager.
Un des liens d'article intéressant à lire, intégré ici dans la photo de Marceline.
A LIRE ABSOLUMENT
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